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25 février 2020

Le programme d’action ZAE+, vecteur d’énergie durable et d’emplois au Mali

Interview croisée de Grégoire Gailly, Responsable Programme ZAE+ et Cécile Henriot, Directrice Afrique de l’Ouest.

Temps de lecture : 7 minutes.

Contexte. En Afrique de l’Ouest, le Geres a choisi de faciliter l’accès à l’énergie des Très Petites Entreprises (TPE) et Micro Entreprises Rurales (MER) installées dans des villages sans accès à l’électricité ou très peu. Le concept ? La Zone d’Activités Electrifiée. Un projet ancré dans le paysage malien en 2015 à Konséguéla, puis en 2019 à Koury.

Satisfait des dynamiques créées par les premières ZAE, le Geres travaille désormais sur les modalités de réplication de ce type de projet, au Mali et en Afrique de l’Ouest. Grégoire et Cécile nous parlent du concept, de la stratégie de changement d’échelle et des perspectives à venir.

Concrètement, qu’est-ce qu’une Zone d’Activités Electrifiée (ZAE) et quelles sont ses caractéristiques ?

Le concept se distingue selon quatre piliers :

  • La construction d’un ensemble de bâtiments professionnels bioclimatiques (c’est-à-dire en accord avec le climat et l’écosystème) conçus pour héberger les petites entreprises
  • L’installation d’une source d’énergies renouvelables de qualité et disponible en continu pour tous
  • La proposition d’un soutien à l’entrepreneuriat (formation, management d’entreprise…)
  • La facilitation de l’accès aux financements pour les petites entreprises installées

Une fois la ZAE mise en place, comment garantir sa pérennité économique au quotidien ?

Avant tout, chaque service fourni a un coût préalablement défini et adapté au pouvoir d’achat des usagers potentiels. Il faut savoir qu’en définissant ces coûts, nous gardons toujours à l’esprit les contraintes règlementaires mais aussi les charges de fonctionnement de l’infrastructure.

Il s’agit véritablement d’un équilibre au plus juste qui doit être trouvé et validé entre les différentes parties prenantes.

Justement, qui sont les protagonistes dans ce type de projet ?

Il existe aujourd’hui trois acteurs principaux : la commune, le gestionnaire de la ZAE et les TPE (qui peuvent se regrouper en association).
Tous interagissent via des relations contractuelles solides et selon un modèle de gestion déléguée d’une infrastructure publique gérée par un opérateur privé.

Cela fait maintenant 5 ans que la première ZAE a été implantée à Konséguéla, quel est le bilan ?

Très positif ! Après 2 ans d’existence, nous avons relevé plusieurs indicateurs favorables même s’il faut rappeler que la vie des entreprises rurales africaines n’est pas un long fleuve tranquille :

  • 1 terrain communal de 4 400 m²
  • 750 m² de bâtiments artisanaux bioclimatiques
  • 1 centrale solaire dont un champ photovoltaïque de 12,5 KWc (unité de puissance pour un panneau solaire) et une capacité de stockage de 118 KWh
  • 1 groupe électrogène de 20 KVA (kilovoltampère, unité de puissance d’un compteur dans une installation domestique) fonctionnant à l’huile de jatropha (agrocarburant local)
  • 10 TPE installées dont 5 gérées par des femmes
  • 6 MWH/an (mégawatt par heure) consommés
  • 68 500 euros/an de chiffre d’affaires par les TPE
  • 35 emplois créés et 150 emplois consolidés

Des résultats encourageants qui ont motivé la création d’une seconde ZAE à Koury en 2019. Avez-vous déjà des premiers retours ?

Oui tout à fait, il s’agit cette fois-ci d’un projet pilote à l’initiative d’une association locale, celle des Artisans et Ouvriers de Koury (ASAOK). L’objectif étant de leur permettre d’améliorer leurs conditions de travail.

Après plusieurs rencontres et une visite de la ZAE de Konséguéla, un projet de Pôle d’Energie Productive (PEP) a donc pu voir le jour en complémentarité avec la centrale hybride existante de l’opérateur Yeelen Kura (opérateur d’électrification rurale malien).

Et les premières données sont à ce jour encore très prometteuses :

  • 1 terrain de l’ASAOK de 10 000 m²
  • 800 m² de bâtiments artisanaux bioclimatiques
  • 1 centrale solaire 10,4 KWc et une capacité de stockage de 27 KWh
  • 1 groupe électrogène de 20 KVA fonctionnant à l’huile de jatropha (agrocarburant local)
  • 1 ligne MT de 1 km pour relier le PEP à la centrale de Yeelen Kura
  • 15 petites entreprises identifiées et accompagnées (plans d’affaires, formalisation, accès au crédit, etc..) en cours d’installation sur le site
  • 1 jeune femme ingénieure malienne recrutée pour la gestion technique et commerciale du site

De quel(s) type(s) de soutien financier avez-vous bénéficié pour ces deux ZAE ?

Pour celle de Konséguéla, nous avons eu la chance d’avoir celui de l’Union Européenne, le Fonds Français pour l’Environnement (FFEM), l’AFD, le Comité Français pour la Solidarité Internationale (CFSI), le fonds de dotation Synergie Solaire, la fondation Nexans, la fondation Michelham, la fondation Un Monde par Tous, ECODIS et la Fondation EDF.

Quant à la ZAE de Koury, le financement a été réalisé dans le cadre de la FISONG Energie (Facilité d’Innovation ONG) de l’AFD, avec le soutien de la fondation Nexans, la fondation Michelham, le fonds de dotation Synergie Solaire et l’Ambassade de Suède au Mali à travers ASDI. Et il faut également noter l’engagement très fort de l’Association des Artisans dans la recherche de financements et dans l’obtention d’un prêt permettant de prendre en charge plus de 50% des coûts des bâtiments !

Suite à ces deux premières expériences réussies, vous avez choisi la stratégie de changement d’échelle. Pouvez-vous nous en parler ?

Le Geres envisage de promouvoir et diffuser le concept de ZAE au Mali et dans la sous-région. Dans cette logique, nous avons choisi d’enclencher une stratégie de changement d’échelle pour accélérer le déploiement de cette solution à travers 2 axes principaux :

  • Développer des projets de déploiement ZAE portés par le Geres en veillant à assurer la pérennité des infrastructures à long terme
  • Accompagner des partenaires à déployer des ZAE dans leur zone en veillant à respecter les fondamentaux

À terme, notre souhait est qu’avec le temps, le rôle du Geres soit dégressif (voir schéma ci-dessous).

Dans ce contexte, pourquoi proposer la création d’une entreprise sociale ?

Selon nous, mettre en place une entreprise sociale de gestion des ZAE est essentiel pour la pérennisation des infrastructures financées sur fonds publics et gérées par un/des opérateurs privés.
Elle est le fruit d’une réflexion déclinée en trois idées fortes :

  • Assurer la stabilité des ZAE au niveau local et garantir une capacité de supporter les coups durs
  • Mutualiser des fonctions techniques et commerciales pour assurer un bon fonctionnement des ZAE
  • Agréger plusieurs micro-projets en un projet de plus grande envergure plus intéressant et sécurisant pour les investisseurs potentiels

Il est également important pour nous de souligner que l’un des enjeux du développement d’une telle entreprise repose sur la nécessité de trouver des solutions acceptables pour mobiliser de l’investissement public et privé.

Finalement, la bonne gestion de ces différentes sources de financement permet de rendre les solutions de qualité accessibles à un public souvent considéré comme précaire et défavorisé.

    Est-ce que cette réflexion stratégique vous a notamment permis de faire émerger d’autres solutions concrètes sur le terrain ?

    Oui, complètement ! La fixation d’une compétence technico-économique en zone rurale sur les énergies renouvelables pour gérer une ZAE est une opportunité pour déployer des solutions solaires autonomes dans les villages isolés.

    Si le Geres s’est concentré en tant qu’ONG sur l’énergie pour les entreprises rurales, un sujet peu traité par les autres acteurs du secteur, la réflexion sur le développement d’une entreprise sociale de gestion des ZAE nous a amené à réfléchir à des solutions solaires autonomes pour le dernier kilomètre y compris pour les ménages.

    L’offre proposée dans le cadre de cette entreprise sociale vise à rendre accessible la qualité à un prix acceptable en zone isolée. Cette équation s’avère possible grâce à une ingénierie financière innovante et à un service de maintenance de proximité au dernier kilomètre.

    Aujourd’hui, quelles sont les prochaines étapes ?

    Une première étape de changement d’échelle est actuellement en cours au Mali sur financement de l’Agence Suédoise pour le Développement International et donnera lieu à la mise en place de 6 nouvelles ZAE d’ici 2021. Elle prendra bien sûr en compte l’émergence de l’entreprise sociale comme un axe fort du projet.

    En savoir plus sur l’accès à l’énergie durable pour toutes et tous au Mali.

    Propos recueillis par Anna Revert, chargée de communication au Geres.

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